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“Allemagne et généalogie”, interview de Sandrine Heiser, auteure de ce nouveau guide essentiel pour vos recherches !

Le 22 sept. 2023 par Frédéric Thébault

Ce nouveau guide de généalogie, consacré aux recherches en Allemagne, fera la joie de nombreux chercheurs ayant des ancêtres dans ce pays. Il a été rédigé par Sandrine Heiser, conservateur en chef du patrimoine aux Archives nationales. Nous avons souhaité lui poser quelques questions afin qu’elle nous présente son ouvrage.

Sandrine Heiser est également à l’initiative de la première Journée du généalogiste tenue au Service historique de la Défense. Elle a coécrit les guides sur Porquerolles, “Archives militaires, mode d’emploi” et “Alsaciens et Mosellans de 1870 à 1945” ; elle est enfin l’auteure du livre “Retrouver un ancêtre blessé en 1914-1918”, prix Histoire 2018 de l’AP-HP. Nous la remercions pour toutes ses réponses.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous en dire plus sur votre parcours professionnel et généalogique ?

Je suis archiviste depuis plus de trente ans et j’ai travaillé tout d’abord au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères avant de rejoindre les Armées où j’ai développé des liens durables avec la sphère généalogique. Je suis notamment à l’initiative de la première journée du généalogiste qui s’est tenue au Service historique de la Défense.

Depuis 10 ans, je suis en poste au ministère de la Culture, tout d’abord aux Archives de France où j’ai traité des questions de commémoration et d’héraldique. Depuis 2016, je pilote des grands projets numériques au sein des Archives nationales, comme la plateforme d’archivage numérique ADAMANT et plus récemment l’accès sécurisé à la salle de lecture virtuelle, le nouveau nom de l’ancienne SIV (salle des inventaires virtuelle).

Est-ce que votre profession, votre “connaissance du milieu”, vous a aidé pour la réalisation du guide ?

Cela fait quelques années que mes recherches généalogiques ne portent plus vraiment sur ma famille mais bien au-delà, sur les sources généalogiques en général et les usages numériques en particulier. Ma « connaissance du milieu » m’a surtout facilité les contacts avec les collègues allemands qui m’ont accueilli avec beaucoup de bienveillance et m’ont présenté les archives en lien avec les recherches sur les origines familiales : « Familienforschung ».

J’ai visité douze États (Länder en allemand) sur les seize qui composent l’Allemagne et à chaque fois j’ai été très bien accueillie. Quelquefois, les archivistes étaient surpris de voir une Française parcourir le pays pour se lancer dans une recherche aussi vaste et a priori complexe. Je pense que mes compétences en gestion de projet m’ont permis de bien délimiter le périmètre et respecter les délais que nous avions prévus pour publier le guide. Ma curiosité archivistique a surtout été un moteur et j’envisage d’ailleurs de poursuivre mes travaux en réalisant une étude comparée de l’accès aux archives en France et en Allemagne.

Pourquoi ce guide sur les recherches généalogiques en Allemagne ? Est-ce lié à vos propres recherches, je pense bien sûr à votre nom de famille ?

Oui et non ! Mon précédent guide co-écrit avec Édouard Vasseur portait sur les Alsaciens et Mosellans de 1870 à 1945, un sujet en lien direct avec mes propres recherches familiales. Je suis née en Moselle, comme mon nom de famille peut le laisser supposer. Comme dit, chaque projet doit avoir une fin et je n’ai pas eu le temps – à l’occasion de cette quatrième collaboration fructueuse avec Archives & Culture – d’approfondir ma connaissance des sources généalogiques conservées en Allemagne. Alors, lorsque l’opportunité s’est présentée de creuser ce sujet, je n’ai pas hésité une seconde et je me suis lancée dans l’aventure.

En Allemagne, je n’ai pas recherché des archives concernant mes ancêtres mosellans mais je suis notamment partie en quête d’un prisonnier de guerre allemand employé dans la ferme de mes grands-parents au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. J’ai retrouvé la trace de Joseph Nebel aux Archives départementales de la Moselle dans les archives des évadés de 1948 et des informations complémentaires à Berlin, au département des Archives fédérales (Bundesarchiv) dédié aux recherches personnelles (Abt. PA) qui se trouve au Nord de la capitale (Am Borsigturm 130) dans les anciens bureaux Motorola.

Ce guide a pour objectif de présenter à la fois les sources françaises et allemandes permettant d’accompagner le généalogiste dans sa quête d’ancêtres outre-Rhin. Je consacre le 2e chapitre aux Allemands en France en offrant une vision d’ensemble des principaux documents généalogiques conservés par le réseau des Archives en France, le Service historique de la Défense et les Archives diplomatiques.

Pouvez-vous nous donner un aperçu des principaux défis auxquels les généalogistes débutants pourraient être confrontés lorsqu’ils entreprennent des recherches en Allemagne ? Comment votre guide les aide-t-il à les surmonter ?

Selon moi, ils sont de deux natures différentes et peuvent en effet décourager des généalogistes débutants mais aussi déstabiliser quelquefois des chercheurs d’ancêtres plus aguerris. Le premier obstacle que j’identifie est le coût de la recherche et le second les difficultés liées à la graphie et à la langue allemande.

Pour les recherches à des fins privées et notamment généalogiques, les services d’archives facturent des frais de traitement en fonction du temps de travail et, le cas échéant, des frais de reproduction. Dans le guide, j’indique que dans certains Länder des exonérations sont accordées si les recherches portent plus largement sur un lieu ou si elles sont réalisées dans le cadre d’une association de généalogie. 

En conséquence, le recours à une association, à un traducteur pour les actes en allemand ou à un généalogiste professionnel spécialisé dans les recherches en Allemagne pourra le cas échéant s’avérer un bon calcul.

Mais aujourd’hui avec un clic droit il est aussi possible de traduire la grande majorité des sites internet qui offrent déjà de nombreuses ressources en ligne et des conseils pratiques. Il y a une marche à franchir et chacun doit s’interroger sur sa motivation pour y parvenir. Mais le guide vise à l’accompagner dans ses démarches.

Allemagne et généalogie, retrouver ses ancêtres
allemands”éd. Archives & Culture, 96 pages, 13€

Quelles sont les principales différences ou particularités que les généalogistes doivent garder à l’esprit lorsqu’ils effectuent des recherches en Allemagne ?

Pour retrouver ses ancêtres allemands, il n’existe pas une méthode unique applicable dans tous les Länder, ni un cadre de classement des archives comme celui que nous connaissons en France dans les services départementaux. Il ne faut surtout pas penser en généalogiste français disposant d’un code du patrimoine et d’archives accessibles gratuitement en ligne. En Allemagne, les seize États fédérés sont dotés de leur propre constitution et de leur propre loi sur les archives.

Les archives principales ne se trouvent pas forcément dans la capitale du Land et la répartition des fonds reflète l’histoire du pays. La partie centrale du guide s’intitule « Des histoires allemandes » et vise à présenter de manière synthétique les Länder, leurs particularités, les fonds qui y sont conservés, avec toujours des exemples de sources généalogiques.

Pour la Bavière, je présente les archives de l’armée bavaroise que j’ai eu la chance de consulter à Munich. Les généalogistes abonnés à Ancestry connaissent les fonds conservés par les Archives de l’État de Bavière (Abteilung IV – Kriegsarchiv) grâce aux « listes des personnels de l’armée bavaroise » durant la Première Guerre mondiale que j’avais évoquées dans mon précédent guide. Mais les documents qui se trouvent Leonrodstrasse couvrent une période bien plus vaste, éclairant l’histoire militaire bavaroise de la guerre de Trente Ans à 1919.

Les technologies numériques jouent un rôle de plus en plus important dans les recherches généalogiques, mais on a un peu l’impression que l’Allemagne est à la traîne par rapport à la France, comment expliquez-vous cela ?

C’est en effet l’impression que j’avais en 2022 en commençant mes recherches, mais je ne pense plus du tout cela aujourd’hui.  Les Allemands avaient fini d’indexer les noms de leurs morts de la Première Guerre mondiale dès 2014 et leurs associations généalogiques sont dynamiques.

Le Verein für Computergenealogie e. V. est la plus grande association d’Allemagne pour la recherche familiale, plus connue sous l’appellation CompGen. Comme son nom l’indique, l’association pour la généalogie informatique utilise les technologies de pointe pour structurer les informations et faciliter les recherches croisées. Son site www.compgen.de offre en libre accès plus de 50 millions de données en ligne. L’association encourage la publication en ligne des livres de familles locaux pour en faciliter l’accès et la mise à jour.

Dans Allemagne et généalogie, j’ai consacré mon dernier chapitre aux ressources en ligne en incluant les sites payants, ce que je n’avais pas fait jusqu’à présent. Pour ce 6e guide, l’archiviste que je suis a un peu quitté sa zone de confort et je vais au-delà de la simple présentation des fonds d’archives. Au regard des difficultés que nous venons de mentionner et qui sont bien réelles, il faut vraiment faire feu de tout bois.

À la fin du guide, j’évoque les offres des portails généalogiques, notamment Ancestry et Geneanet. Ancestry Germany a signé un partenariat avec environ 120 services d’archives et bibliothèques nationales, locales ou municipales allemandes. Il faut bien avoir en tête que tous les sites Ancestry sont indépendants, mais on peut facilement traduire le contenu allemand en français.

Auriez-vous un exemple de cas complexe de recherche généalogique en Allemagne pour un débutant, qui pourrait être résolu grâce aux informations que vous donnez dans le guide ?

C’est en tout cas la démarche que j’ai adoptée. Une recherche généalogique « simple » en France peut s’avérer être un « cas complexe » en Allemagne. Comme je ne cherchais pas un ancêtre en particulier, je me suis intéressée à des personnages publics pour mettre à l’épreuve les conseils que je prodigue dans le guide.

J’ai voulu par exemple retrouver des informations sur Peter Kürten, surnommé le vampire de Düsseldorf. Il s’agit du tueur en série qui a inspiré M. le Maudit de Fritz Lang, film sorti en mai 1931, quelques semaines après la condamnation à mort de Kürten.

Comme tous les archivistes, j’avais été marquée par l’effondrement début mars 2009 du bâtiment moderne et modèle qui abritait les archives municipales de Cologne. J’ai donc cherché à savoir si les fonds qui y étaient conservés étaient à nouveau accessibles 14 ans après le sinistre et dans quelles conditions. Depuis 2021, Cologne dispose d’un nouveau site qui abrite les archives municipales, les archives historiques ainsi que les archives photographiques rhénanes.

J’ai également découvert que les actes de décès avaient été numérisés pour l’ensemble du Land Rhénanie-du-Nord-Westphalie pour la période 1874-1938. On y trouve celui de Peter Kürten enregistré sous le n° 433 le 2 juillet 1931, jour de l’exécution par guillotine ; le décès est déclaré par le commissaire de la huitième circonscription criminelle de Cologne.

Pour consulter l’acte en ligne, il convient de déplier l’arborescence et d’ouvrir le lien « Open in the Mets Viewer » grâce au navigateur Firefox, c’est la petite subtilité ! Dans le guide, je donne de nombreux liens vers les pages de référence, mais après, il faut naviguer pour retrouver les documents qui ne sont pas indexés.

Enfin, quel conseil essentiel donneriez-vous aux généalogistes débutants qui se lancent dans des recherches en Allemagne, en se basant sur votre expertise et votre guide ?

Comme je viens de l’indiquer, il n’existe pas une base de données centralisée qui permet de retrouver en un clic son ancêtre allemand. C’est bien de partir en quête de son histoire familiale outre-Rhin, encore faut-il savoir par où commencer. Pour cela, il est important de comprendre l’organisation des archives en Allemagne et la répartition des fonds entre les services fédéraux et les États. Pour démarrer une recherche, la bibliothèque numérique allemande et Archivportal-D permettent d’explorer de nombreuses ressources généalogiques.

Même si le cadre de classement et la réglementation changent, on retrouve en Allemagne les mêmes typologies de document qu’en France et que les généalogistes connaissent bien. Toutefois, dans la majorité de l’Allemagne l’état civil a été introduit plus tardivement, autour de 1875. Donc la première question à se poser c’est mon ancêtre a-t-il vécu avant ou après cette date.

On y trouve aussi des sources qui renseignent sur la composition du ménage et permettent en outre de suivre les déménagements des membres de la famille. Lorsqu’un nouvel habitant s’installe dans une commune, il devait se déclarer auprès de la mairie, aujourd’hui auprès des bureaux d’enregistrement. Ces déclarations domiciliaires sont la base de l’enregistrement officiel des personnes qu’il s’agisse d’une résidence permanente ou temporaire.

Enfin, il est essentiel de connaître le contexte historique avant de se lancer dans une recherche. Et c’est encore plus vrai en Allemagne, un pays dont les frontières ont connu d’importantes évolutions au cours des siècles. Je commence mon guide par une partie historique d’une vingtaine de page intitulée « Des frontières mouvantes » qui permet de bien poser le cadre.

NB : Merci de ne pas demander de recherches sur vos ancêtres allemands dans les commentaires, ils ne seront pas publiés. Privilégiez les forums spécialisés pour cela.

28 commentaires

Avant 1604 mes ancêtres se nommaient Krust.
Cet ouvrage pourrait-il m’aider à remonter plus loin dans ma lignée?


Mon père a été déporté pour le service STO en 1942, est-ce que ce livre pourrait m’aider à retracer son parcours ? Sachant qu’il est parti à Brème, puis il serait parti ensuite dans une ferme dont je n’ai aucune information. Merci de votre aide. MP.


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