Un tracé ingénieux (3e partie)

Le 21 juil. 2022 par Frédéric Thébault

Chaque mois, Béatrice Beaucourt, paléographe professionnelle, vous propose une courte leçon destinée à vous familiariser avec les écritures anciennes.

Ladifficulté de lecture d’un texte « moderne » depend dedivers facteurs tels que la cursivité de l’écriture, ladéformation du tracé des lettres, la présence de ligatures reliantles lettres les unes aux autres, la personnalisation de l’écriture,l’utilisation d’abréviations signalées, ou non, par un titulusd’abréviation, l’absence de coupure des mots entre eux…

Lacombinaison de deux, ou plusieurs de ces éléments, nécessitera quel’on s’arrête un instant sur la manière dont le ou les motsconcernés ont été formés, afin d’en comprendre le tracé, et lesens.

Jevous propose trois exemples dont voici le dernier.

Exemplen°3

Cesmots, extraits d’un acte notarié daté de 1641, ont été écritsau moyen d’une graphie transitoire « gothico-ronde »très cursive.

L’auteurde cette ligne a fait preuve d’ingéniosité dans le tracé deses lettres :

En utilisant des ligaturesafin de relier les lettres de ses deux mots

Les lettres de ces deux mots sont liées les unes aux autres. Ainsi, sans relever sa plume, le scribe a écrit deux mots, dont voici le second :

Lepremier signe abréviatif est lié à la lettre « t »,qui, de fait, présente une très longue attaque. Sans lever sa plumel’écrivant a barré sa lettre « t » et tracé dans lafoulée le jambage de la lettre « i », puis, toujoursdans le même trait de plume, il a écrit un « e » boucléet enfin un « s » à jambage et double aigrette.

En utilisant uneabréviation et un signe abréviateur

Ces mots sont en effet abrégés.

Lepremier mot débute par la lettre « l » puis viennent un« e » bouclé, un « s » et un « d »plongeant sous la ligne d’écriture, par déformation, pour montrerl’abréviation, puis, sans relever sa plume, le scribe a tracé unsigne abréviatif puis les lettres « ties » mentionnéesci-dessus.

–En omettant de couper nettement ses mots entre eux.

Voici le premier mot :

et voici le second :

En utilisant une graphie déformée de certaines lettres pourécrire plus rapidement.

Notammentavec le tracé du « s » à jambage et double aigretteprésent à la fin du second mot.Cette graphie du « s »est un des modèles de déformation du « s » à jambageet double aigrette induit par la cursivité de l’écriture.

Jevous laisse le soin de lire ces mots…Je vous donnerai la réponsele mois prochain.


Réponse du mois dernier : il fallait lire les mots This image has an empty alt attribute; its file name is image-3.png « en ce que en »
 
 
 

 
 
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